Cahier de recherche no 2017-08
Régimes de retraite publics : Analyse de la flexibilité du système actuel et effets d’une réforme possible
Antoine Genest-Grégoire et Luc Godbout, avec la collaboration de Martin Dupras
Le système de retraite québécois est le sujet de nombreux débats en raison du vieillissement de la population, de la raréfaction des régimes privés de retraite et de la faiblesse des rendements sur les marchés financiers des dernières années. Le rapport D’Amours présenté en 2013 faisait état de plusieurs constats sur la pérennité de ce système et proposait une série de mesures pour en améliorer la solidité. Ces mesures incluaient, entre autres, la bonification de la couverture publique par la mise en place d’une rente longévité et l’appui à la mise en place de régimes volontaires d’épargne-retraite (RVER). Dans cette perspective, les RVER sont en place depuis peu au Québec et des discussions sont en cours afin de bonifier le Régime de rentes du Québec, d’une façon analogue à la proposition de rente longévité.
En effet, en 2016, les autres provinces canadiennes, avec le gouvernement fédéral, ont déjà décidé de modifier le Régime de pensions du Canada (RPC) en ce sens. Le Régime de rentes du Québec (RRQ), homologue du RPC, est appelé à être lui aussi révisé. Une commission parlementaire s’est déjà penchée sur cette question au début de 2017.
Ce cahier présente, par une série de simulations, le fonctionnement du système québécois de retraite. On y insiste notamment sur la flexibilité qu’il offre grâce à la possibilité pour un retraité de demander ses rentes publiques à divers moments sans nécessairement coïncider avec la prise de la retraite. Il est alors possible de déterminer l’épargne requise, le taux d’épargne nécessaire pour y arriver ainsi que le taux de couverture publique des régimes gouvernementaux selon l’interaction de différentes variables tels l’âge de la retraite et l’âge de la prise des prestations publiques, s’ils diffèrent.
Les simulations réalisées permettent de voir que, selon l’âge de prise de la retraite et l’âge de demande des prestations publiques, une personne qui gagnait le maximum des gains admissibles (MGA) au Régime de rentes du Québec, soit 54 900 $ en 2016, peut voir la couverture de ses besoins à la retraite assurée par les régimes publics passer de 46 à 82 %. Une personne dont les besoins sont couverts à un plus haut degré par les régimes publics voit diminuer son risque de survivre à son épargne, le risque de longévité, et son risque de voir son épargne perdre de sa valeur à un moment crucial en raison des fluctuations des marchés financiers, le risque de marché. Les personnes qui repoussent le moment de prendre leur retraite, mais surtout le moment de demander leurs prestations, voient non seulement la couverture publique qui leur est offerte augmenter, mais ils diminuent également leur besoin d’épargne pendant leur carrière. Toujours au MGA, le taux d’épargne en carrière peut ainsi diminuer de 17 % à 8 % du revenu brut.
Par ailleurs, les personnes qui gagnaient la moitié du MGA pendant leur carrière, soit 27 450 $ en 2016, bénéficient d’une couverture publique complète si elles prennent leur retraite à 65 ans, principalement grâce au Supplément de revenu garanti offert par le gouvernement fédéral.
La principale proposition de réforme du RRQ, le reflet de celle qui a été adoptée par les autres provinces canadiennes, consiste en une hausse des prestations versées, les portant à 33 % du revenu de carrière par rapport aux 25 % actuels. En contrepartie de contributions plus élevées pendant sa carrière, le travailleur bénéficierait donc d’une couverture publique accrue lors de sa retraite. Des simulations réalisées sur la base de cette réforme montrent qu’un retraité ayant gagné le MGA pendant sa carrière pourrait atteindre un taux de couverture publique de 100 %, en repoussant au maximum la demande de ses prestations publiques, ce qui n’est pas possible à l’heure actuelle. Une telle réforme se traduirait également par des besoins d’épargne moindres pour un même niveau de couverture publique, même en tenant compte des cotisations supplémentaires à verser en carrière, y compris celles que doit verser l’employeur du travailleur.
Compte tenu de la flexibilité offerte par les régimes publics actuels, la réforme envisagée du RRQ donnerait à plus de retraités la possibilité d’obtenir une plus importante couverture publique de leurs besoins à la retraite, voire une couverture complète, possibilité dont ils bénéficieraient à des niveaux de revenus plus élevés ou des âges moins avancés. La réforme leur permettrait en outre de bénéficier de revenus à la retraite comparables à la situation actuelle en contrepartie d’une épargne privée moindre que celle requise aujourd’hui.
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