Cahier de recherche no 2016-03

Littératie fiscale: exploration du concept et bulletin de la population québécoise.

Genest-Grégoire, A., Godbout, L. et Guay J.-H.

Depuis la crise financière de 2008, beaucoup d’intérêt a été porté à la littératie financière. Les connaissances et les compétences qu’ont les citoyens en matière de finance ont un impact important sur leur habileté à opérer en société et à atteindre leurs objectifs de vie tel que l’achat d’une résidence ou l’atteinte d’un certain niveau de revenu à la retraite. De nombreuses études ont été réalisées sur le sujet et les décideurs publics ont adopté diverses mesures pour tenter de favoriser l’acquisition de telles connaissances dans la population. Un aspect de la littératie financière qui a toutefois été délaissé est celui qui concerne la fiscalité. En effet, les taxes et impôts représentent une des principales obligations financières auxquelles les citoyens doivent faire face. De plus, la myriade de programmes sociaux et financiers associés au système fiscal peuvent être une source de revenus importants et un appui à certains des objectifs présentés plus tôt. Le présent cahier de recherche s’attarde donc à la littératie fiscale, soit le fait de disposer des connaissances et des compétences permettant la prise de décisions fiscalement responsables.

Cette étude présente un outil de mesure par sondage des connaissances et des attitudes face à la fiscalité. La littératie financière étant fréquemment mesurée par le biais de courts quiz sur les connaissances de base en finance, une approche similaire a été suivie pour mesurer la littératie fiscale. Les questions posées sous forme de quiz incluaient, notamment, des questions sur les taxes à la consommation, leur niveau et les biens et services qu’elles touchent. Des questions portant sur la façon dont sont imposés différents types de revenus ont également été posées. Le questionnaire incluait également des questions portant sur la progressivité de l’impôt sur le revenu, afin de mesurer la perception du niveau de redistribution des citoyens.

Le questionnaire a été testé sous forme de sondage auprès des adultes québécois à l’automne 2015. Les résultats moyens sont relativement faibles, alors que la note moyenne était de 55 %, soit entre 9 et 10 bonnes réponses aux 18 questions portant sur les connaissances en matière de fiscalité. Il apparaît que c’est la progressivité de l’impôt qui soit la composante de l’impôt la moins bien comprise par les répondants. Leur niveau de littératie fiscale tend être plus élevé s’ils ont des revenus ou un niveau de scolarité plus élevé. Les répondants en milieu de vie ont de meilleures connaissances que les plus jeunes ou les plus vieux et aucune différence n’apparaît entre hommes et femmes. Les répondants fournissent généralement une bonne estimation de leur propre niveau de connaissance, mais les femmes tendent à sous-estimer leurs connaissances de façon plus marquée que les hommes.

Cette première étude sur le sujet de la littératie fiscale vise à ouvrir la voie à d’autres analyses et réflexions. Les connaissances en fiscalité sont par exemple associées à l’utilisation, ou la non-utilisation, des mesures fiscales ciblées telles que les crédits d’impôt pour l’activité physique ou les dons de charité et pourront donc contribuer à leur évaluation. De faibles connaissances en matière de fiscalité sont également associées à une confiance moindre envers le système fiscal, ce qui peut se traduire par une plus grande propension à l’évitement ou l’évasion fiscale. Un système fiscal intelligible et bien compris est donc, entre autres, un gage d’une plus grande confiance envers les institutions publiques et le système de solidarité qu’elles soutiennent.

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