Cahier de recherche no 2017-05

Classes sociales et fiscalité : comment perçoit-on la classe moyenne? Des résultats confrontant la réalité et la fiction

Antoine Genest-Grégoire, Jean-Herman Guay et Luc Godbout

La classe moyenne occupe une place prépondérante dans le discours de nos élus. Les politiciens de toutes les orientations disent parler au nom de la classe moyenne et avoir à cœur ses intérêts. Ce cahier de recherche vise à mesurer le sentiment d’appartenance des Québécois à la classe moyenne, à la comparer à une mesure reconnue de cette classe et à observer comment cette perception influe sur leur perception de la répartition des impôts.

La théorie la plus courante en ce qui concerne la perception biaisée de la classe sociale est la théorie du groupe de référence, qui stipule que les individus auraient tendance à se placer plus proche du centre de la distribution des revenus qu’ils ne le sont réellement, parce qu’ils évaluent leur position relative en fonction de leur cercle social plutôt que de la société à laquelle ils appartiennent dans son ensemble. Comme les individus tendent à côtoyer des personnes qui leur ressemblent, ils auraient alors tendance à se considérer comme proche de la moyenne, même s’ils appartiennent à des classes défavorisées ou privilégiées. Le corollaire de cette théorie est que les individus auraient tendance à sous-estimer le degré d’inégalités au sein de leur société.

Une des définitions courantes de la classe moyenne est de considérer que les personnes dont le revenu est compris entre 75 et 150 % du revenu médian en font partie. Cette mesure indique, par exemple, qu’un célibataire québécois fait partie de la classe moyenne si son revenu est compris entre 29 000 $ et 57 000 $ par an, avant impôts mais après transferts gouvernementaux tels que les prestations familiales ou de retraite. Il en va de même pour une famille de 4 personnes si son revenu total est compris entre 58 000 $ et 114 000 $ par an. Selon ces bornes, ce sont près de 42 % des ménages québécois qui appartiennent à la classe moyenne.

Par contre, lorsque l’on demande directement aux Québécois à quelle classe ils croient appartenir, près 56 % d’entre eux croient faire partie de la classe moyenne. Ce sont majoritairement les personnes plus aisées, dont les revenus sont trop élevés pour faire partie de la classe moyenne, qui croient à tort en faire partie.

Cette différence entre classe perçue et classe réelle se reflète également dans la perception de la répartition de l’impôt sur le revenu.

Le cahier de recherche apporte un nouvel éclairage sur les inégalités de classes perçues et réelles au Québec et sur l’effet de telles perceptions sur la structure des débats politiques autour de la fiscalité.

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