Taxe sur les services numériques, une chronologie

Certaines multinationales sont en mesure d’entretenir des relations directes avec leurs clients par le moyen d’outils numériques (plateformes de médias sociaux, moteurs de recherche, places de marché virtuelles), minimisant l’importance d’une présence physique. Dans un tel contexte, la présence d’un établissement stable ouvrant droit à l’imposition par un État perd de sa pertinence.

Afin de palier à cette iniquité de traitement fiscal favorisant les sociétés étrangères et contribuant à l’érosion de leur base fiscale, certaines juridictions ont mis en place des taxes sur les services numériques. D’autres projettent de le faire. Ces prélèvements, visant le revenu d’entreprises sans établissement stable, ont toutefois comme inconvénient de générer des problématiques de double imposition.  

La figure suivante, préparée par Allison Christians et Mahwish Tazeem de l’Université McGill présente une chronologie des initiatives nationales en matière de taxe sur les services numériques (digital service tax –DST)

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Taxe sur les services numériques (DST) chronologie

Information à jour en date du 24 juillet 2020

Plusieurs pays ayant annoncé la mise en place de DST ont, du même souffle, précisé que ces taxes seraient retirées advenant la mise en place d’une forme de taxation multilatérale. L’OCDE cherche une solution permettant d’intégrer l’économie numérique aux règles fiscales internationales.

À cet effet, une proposition de l’OCDE vise à redéfinir les critères d’établissement stable, introduisant la notion de territoires de marché. De plus, les règles de prix de transfert actuelles seraient ajustées afin de modifier la manière dont seraient alloués les profits entre juridictions pour les transactions à forte composante numérique (pilier 1).

En théorie, le mise en place de ces propositions permettrait notamment au Canada d’imposer une part du profit résiduel présumé1 d’un groupe multinational dans le domaine du numérique et interagissant à distance avec ses clients canadiens (qu’il détienne un établissement stable au Canada ou non). Comme le précise l’OCDE, il convient cependant de noter que le simple fait pour une société de vendre des biens corporels à l’étranger ne sera pas suffisant pour créer le lien menant à l’imposition au lieu de destination de ces biens. Dans ce cas, d’autres critères supplémentaires devront être respectés afin de permettre au pays de destination d’imposer une part du profit du vendeur2.

Les propositions de l’OCDE ne sont pas encore définitives. Néanmoins, le 31 janvier 2020, le Canada et 136 autres pays membres du cadre inclusif sur le BEPS ont soutenu fortement les principes contenus au pilier 1 à titre de base de travail pour mener les négociations multilatérales visant la redéfinition de la base taxable des multinationales3. Ce support s’étend aux propositions du pilier 2 qui visent quant à elles à instaurer un impôt minimal mondial, de façon à contrecarrer les pratiques d’évitement fiscal des multinationales4.

La pandémie de COVID-19 a ralenti les travaux de l’OCDE. L’échéancier pour en arriver à une solution est néanmoins maintenu pour la fin de la présente année. Les États-Unis et la Chine ont exprimé des réticences quant aux solutions avancées jusqu’à maintenant et celles-ci pourraient être ajustées afin d’en arriver à un compromis acceptable pour toutes les parties.

Notes :

[1] OCDE, Document de consultation publique – Proposition du Secrétariat d’une « Approche unifiée » au titre du Pilier 1, 2019, en ligne : http://www.oecd.org/fr/fiscalite/beps/document-consultation-publique-proposition-secretariat-approche-unifiee-pilier-1.pdf, par. 30. Le profit résiduel est la différence entre le profit consolidé réel et un niveau de profit « standard ». L’OCDE ne définit pas avec précision ce niveau de profit standard pour le moment.

[2] OECD, Statement by the OECD/G20 Inclusive Framework on BEPS on the Two-Pillar Approach to Address the Tax Challenges Arising from the Digitalisation of the Economy, janvier 2020, OECD/G20 Inclusive Framework on BEPS, OECD, Paris, par. 39.

[3] OECD, International community renews commitment to multilateral efforts to address tax challenges from digitalisation of the economy, en ligne : https://www.oecd.org/newsroom/international-community-renews-commitment-to-multilateral-efforts-to-address-tax-challenges-from-digitalisation-of-the-economy.htm, consulté le 19 février 2020.

[4] OCDE, Document de consultation publique – Proposition globale de lutte contre l’érosion de la base d’imposition (« GloBE ») – Pilier deux, 2019, en ligne : https://www.oecd.org/fr/fiscalite/beps/document-consultation-publique-proposition-globale-lutte-contre-erosion-base-imposition-pilier-deux.pdf.

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